De la domination
Mardi 20/03/12
J'avais eu un cours sur l'évaluation - notamment des poli tiques publliques. On y parlait des rapports de pouvoirs entre l'Etat et les collectivités terrritoriales avant la décentralisation. Le premier dominait clairement les secondes. On a parlé de la domination et le point de vue m'a semblé très intéressant.
Selon ce maître de conférence formé à sciences po, la domination existe car le dominé reconnaît comme NORMALE la relation, il a fait une norme de ce qui est inacceptable. Le prof affirme même que c'est le dominé qui crée la relation de domination.
Exemple N°1 : Le prof domine le groupe d'élèves que nous sommes car il détient un savoir que nous n'avons pas. Il exige que nous fassions silence durant son cours et que nous levions le doigt pour prendre la parole. Pour autant, rien ne nous oblige à reconnaître son pouvoir sur nous. C'est parce que nous avons accepté cette relation comme NORMALE qu'il peut montrer sa supériorité. Nous avons signé un contrat avec l'école et accepté l'idée que l'école nous fournirait un prof capable de nous apporter les connaissances requises.
Exemple N°2 : Face à nous un homme nous menace avec un bâton. Il nous domine par la force. La balance est déséquilibrée (il détient des ressources que nous ne possédons pas) mais elle peut se rétablir si nous mobilisons de notre côté des ressources.
- Si notre ressource est de courir comme Usain Bolt, nous sommes sauvés.
- Si notre ressource est d'être aussi fort que Teddy Riner, alors c'est bon.
- Nous pouvons aussi posséder une bombe lacrymogène !
Bref, si nous trouvons des ressources, nous parvenons à l'équilibre des pouvoirs, nous pouvons négocier, voire inverser la tendance.
Je précise que pour ce qui concerne les collectivités, leur pouvoir réside dans les impôts locaux et leurs connaissances du terrain, leur expertise.
La domination / l'emprise de PN
Comment je m'explique cette relation de domination ?
J'avais expliqué à plusieurs reprises que cette relation s'était installée insidieusement au fil des années, à coups de dénigrements subtils entrecoupés de numéros de charme. Puis les dénigrements sont devenus de moins en moins subtils et se sont transformés en reproches directs et en rabaissements humiliants.
Bien sûr, pour que l'emprise fonctionne, il fallait que cela soit progressif et sur un long terme. Sinon je risquais de prendre la fuite et rompre cette relation. Les moments d'accalmie ou de gentillesse ont consisté en des gestes hyper généreux : PN m'avait reversé une fois une partie de ses primes de fin d'année, puis il m'a aussi acheté une voiture - mais je devais lui rembourser 300 € par mois, ce que j'ai refusé ! Il m'avait "bâillonnée" avec ces "dons". Je ne lui avais rien demandé. Ces "cadeaux" étaient sans mesure, à côté de cela pas de petits cadeaux, pas de geste d'amour ou de tendresse. Aucune démonstration sentimentale. PN disait que nous avions dépassé l'âge de faire des "mamours ridicules".
Je ne veux pas replonger entièrement dans mes états d'âme de l'époque et fouiller plus profondément mais je pense que je n'avais pas les ressources nécessaires pour rétablir un équilibre des pouvoirs avec PN.
Renversement de la domination
Pour reprendre le commentaire d'Elisa sur ma note précédente (Rendu de jugement), il m'est arrivé une ou deux fois de m'affirmer devant PN et de renverser la tendance. Je peux aussi être très dure et très cinglante.
Mais dans mon travail sur moi-même de recherche de la bienveillance, cette façon de faire ne me correspondait pas. Je ne voulais pas devenir comme lui. Et surtout, je ne voulais pas que les enfants assistent à ces scènes de violence. Car j'aurais pu le "bouffer" aussi.
Une fois, au cours d'une de nos altercations hebdomadaires, je lui avais tenu tête. Je criais, je lui hurlais ses 4 vérités, je le rabaissais. J'appuyais là où ça faisait mal, je ne le laissais pas en placer une. PN mesure 1,86 m. Je l'ai vu se ratatiner physiquement, cela m'avait fortement surprise. Puis il s'est effondré. Il s'est mis à pleurer comme un enfant. Il m'a dit qu'il souffrait d'avoir perdu sa mère. Qu'elle n'aurait jamais dû mourir et le laisser seul.
J'étais sidérée.
Plus tard, nous avons eu des disputes où j'avais eu le dessus. Pas plus de deux ou trois fois. J'avais fait le rapprochement avec ce que son frère L. m'avait raconté une fois sur leur mère était très dure avec eux, d'où l'éventuelle explication - selon lui - de son propre célibat et de son incapacité à construire une famille.
Lorsque je criais plus fort que lui, PN devait me prendre pour sa mère. Il devait faire un transfert. Je ne suis pas psy mais j'avais compris qu'il m'identifiait à sa mère et qu'il trouvait un apaisement tout de suite après. Alors il arrêtait de me crier dessus. Je le voyais se calmer subitement, c'était flagrant !
Cela signifiait qu'il avait reçu sa dose de violence ! Comme un drogué.
Le signe
J'avais décrit précédemment la façon qu'avait PN de communiquer sur un mode non verbal, avec des bruits ou des onomatopées. Tel bruit faisait référence à telle personne, il avait tant de fois répété la maneouvre qu'à la maison, les enfants et moi-même, sans qu'il nomme la personne, savions de qui il s'agissait ! Et de qui il allait se moquer. C'est énorme, non ?
Ainsi, PN avait une façon d'agiter le drapeau blanc. Il disait "U", c'est le oui populaire en viêtnamien. Cela voulait dire qu'il se rendait, qu'il baissait les armes. Alors je savais que j'étais tranquille pour un instant. Dans les disputes, quand je parvenais à me faire entendre et qu'il répondait "U", c'était gagné pour moi.
Mon choix
Connaissant la faiblesse de PN, j'aurais pu en profiter et l'enfoncer. Mais je l'ai déjà dit, cela ne correspondait pas à mon travail intérieur, à la personne que je voulais être. Je suis rarement revenue sur ce registre de domination. Alors PN en a profité pour faire pencher la balance de son côté et à confisquer le pouvoir de domination. Soit il souffrait, soit il faisait souffrir. Et il m'a broyée.
Si j'avais agi comme lui, la violence aurait grimpé d'un cran chaque jour et je ne sais pas comment cela aurait fini. Cela aurait aussi signifié que je serais rentrée de plein pied dans son jeu pervers. Et que je serais devenue aussi perverse que lui. Ce n'est pas ce que je voulais.
Aujourd'hui, je suis loin de lui. Je me sens mieux qu'au mois de janvier. Aujourd'hui, je vois PN comme un pauvre hère, un malade mental. Pour autant, je n'ai pas pitié de lui, il m'a fait trop de dégâts. D'une certaine façon, il a contribué à me faire évoluer. Il n'arrive plus à me toucher, j'ai travaillé sur chaque point douloureux. S'il veut attaquer, je saurai me défendre.
Comme je réussis aujourd'hui à refuser cette relation de domination, elle n'existe plus. Je ne lui donne plus corps. PN le dominant n'existe plus puisque je refuse le rôle de dominé. Quant à lui, il se lassera bien un jour. Quand on n'a plus de compagnon, de jeu, ce n'est plus drôle ! PN se cherchera un autre jouet !